Pour rappel, la rupture conventionnelle est une rupture d’un commun accord du contrat de travail entre l’employeur et le salarié, qui ne peut pas être imposée par l’un ou par l’autre et qui repose sur le libre consentement de chacun d’eux (c. trav. art. L. 1237-11).
Elle peut être annulée lorsqu’un vice du consentement est constaté. Les vices du consentement qui peuvent être invoqués sont « l’erreur, le dol et la violence […] lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté » (c. civ. art. 1130 et 1131).
En pratique, c’est le plus souvent le salarié qui invoque un vice du consentement : l’employeur l’a incité à prendre l’initiative de la rupture, notamment en lui faisant des promesses qu’il ne tiendra pas (cass. soc. 9 juin 2015, n° 14-10192 D), l’employeur a prononcé diverses sanctions à l’encontre du salarié pour lui « mettre la pression » et le contraindre à signer la rupture conventionnelle (cass. soc. 9 juin 2015, n° 14-10192 D), la salariée qui avait consenti à la rupture conventionnelle de son contrat de travail souffrait d’un trouble mental (cass. soc. 16 mai 2018, n° 16-25852 D), etc.
Bien que ce soit plus rare, il peut également arriver que ce soit l’employeur qui considère que son consentement a été vicié…
Un responsable commercial avait demandé à conclure une rupture conventionnelle après 8 années passées dans l’entreprise, faisant part à son employeur d’un « souhait de reconversion professionnelle dans le management ».
L’employeur avait accédé à la demande du salarié et conclu avec lui une rupture conventionnelle fin 2018.
Mais quelques mois plus tard, il avait appris que le salarié avait créé une société concurrente à la sienne avec deux anciens salariés de l’entreprise. Et il apparaissait que ce projet était déjà abouti avant la signature de la rupture conventionnelle, laquelle était nécessaire au salarié pour concrétiser son projet.
L’employeur a considéré qu’en dissimulant ce projet de société concurrente et l’identité de ses associés, le salarié avait commis un dol, de sorte que son consentement à la rupture conventionnelle était vicié.
La cour d’appel a donné raison à l’employeur, à juste titre selon la Cour de cassation : le salarié avait volontairement dissimulé des éléments dont il connaissait le caractère déterminant pour l’employeur afin d’obtenir le consentement de ce dernier à la rupture conventionnelle, de sorte que ce consentement avait été vicié.
Lorsque la rupture conventionnelle est annulée en raison d’un vice du consentement du salarié, donc que la nullité est imputable à l’employeur, elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (cass. soc. 16 septembre 2015, n° 14-13830, BC V n° 123).
Dans cette affaire, la Cour de cassation a dû se prononcer sur les effets d’une rupture conventionnelle dont la nullité était imputable au salarié. Et, pour la première fois à notre connaissance, elle pose pour principe que « lorsque le contrat de travail est rompu en exécution d’une convention de rupture ensuite annulée en raison d’un vice du consentement de l’employeur, la rupture produit les effets d’une démission ».
Ce faisant, elle confirme là aussi l’arrêt d’appel, qui avait conclu à une démission.
En définitive, le salarié aura dû :
-non seulement rembourser à l’employeur l’indemnité de rupture, ici d’un montant de 18 775 € ;
-mais également lui verser une indemnité compensatrice au titre du préavis de démission non effectué, ici évaluée à 20 334 €.